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Fiche Œuvre

Femme qui tire son bas

Femme qui tire son bas © Tous droits réservés
Artiste

Henri de Toulouse-Lautrec

(24 novembre 1864 Albi - 9 septembre 1901 Saint-André du Bois)
L’artiste
Chronologie
1894
Technique
huile sur carton
Dimensions
0,615 x 0,445
Numéro d’inventaire
MTL 177
Collection
La collection Toulouse-Lautrec
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Dans une posture presque classique, qui pourrait être celle d’un modèle, Lautrec enlève la silhouette gracieuse d’une femme ajustant son bas. Entré dans l’intimité des filles de maisons closes, il peut croquer chacune de leurs attitudes sur le vif, ou les reprendre à l’atelier ; "Femme tirant son bas" justifierait d’ailleurs pleinement le motif avancé par Joyant pour expliquer pourquoi Lautrec fréquente de façon assidue et régulière les maisons closes : "La était le nu, le nu en mouvement, non le nu conventionnel d’atelier avec des modèles qui hanchent [… ] Lautrec en avait assez des modèles professionnels ; il lui fallait des êtres encore plus près de la nature, dont les gestes, les attitudes ne fussent point entravés". (1)

L’instantané d’un geste familier et extrêmement féminin est ici enlevé avec vivacité d’un trait de peinture à l’essence violette, avec des reprises de couleur bleue pour souligner le contour des jambes d’une ligne plus appuyée ; ces deux couleurs se retrouvent ainsi se confortant sur de nombreuses recherches (voir aussi "Femme rousse vue de dos", Musée Toulouse-Lautrec Albi, inv. 140).

Cette manière de jouer du bout d’un pinceau souple et précis sur un carton qui lui fournit une tonalité de fond, constitue l’une des caractéristiques de la totale liberté de facture de Lautrec : ne s’embarrassant pas de l’évocation, même rapide, d’un décor, il campe cette silhouette où s’exprime son amour du corps de la femme, sans aucune note d’érotisme ou de pornographie. Le geste est naturel et gracieux, mais son rendu, quand bien même il répondrait au souci de rapidité d’une étude, reste étonnant : les jambes sont coupées à mi-mollet, les bras évoqués d’un trait inachevé, la main gauche qui tire le bas à peine esquissée, le modelé à peine rendu par des rehauts blancs jetés en longues diagonales. Et pourtant l’équilibre du corps est parfait, le mouvement clairement lisible ; cet "inachevé" semble au contraire renforcer la puissance et la vivacité du dessin. Le travail de la couleur, même simplifiée, n’est pas moins raffiné : au vert sombre des bas, s’oppose le vert tendre de la chemise enroulée autour du cou, et le flamboiement de la chevelure blond-roux.

La traduction de ce geste quotidien témoigne du regard attentif et non dénué de tendresse du peintre à l’égard des prostituées. Avec une grande économie de moyens, qui fait apparaître plus fortement encore l’habileté du pinceau, Lautrec s’affirme dénué de tout jugement moralisateur. Sans doute doit-on voir là autant une attitude liée à la caste sociale à laquelle il appartient de par sa naissance, que le choix personnel d’un homme qui cherche à exprimer la vie sous toutes ses formes, y compris, et surtout, les moins traditionnelles.

(l) M. Joyant, Henri de Toulouse-Lautrec, 1864-1901, t. 1 le peintre, Floury éd. 1926

© Danièle Devynck, Musée Toulouse-Lautrec, Albi

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